Sur un projet lancé par l’association Art’dep et l’Opac de la Savoie, je suis arrivée à la Cité en 2018, à contre-courant du voisinage, au moment où l’on doit plutôt songer à partir. J’arrive au terme de 3 années de résidence dans un appartement vacant, pendant lesquelles habiter la Cité, était envisagé comme fil conducteur, forme et moyen de création.
L’in-situ est une dimension importante dans mon travail artistique ; être un habitant c’est déjà déterminer et transformer l’espace en un lieu, en le nommant, en le chargeant d’une vie et d’une empreinte bien particulière. À travers la Cité, j’ai installé puis habité une recherche, devenant un hôte, un «mange-serrure*», dont le travail consiste à dénommer des espaces, à faire parler des lieux.

Dans une observation vécue des alentours et au-delà, paysage de quartier dans paysage urbain, j’ai engagé une production d’appartement, en travaillant directement sur les murs ou à petite échelle, par répétition, par séries, au mètre carré. Je me suis inventée décorateur ou sculpteur-d’intérieur, prélevant dehors pour transformer dedans, et inversement, avec la volonté d’effectuer des allers-retours entre la cité et le centre-ville, replaçant l’une dans l’autre et inversement. Dans le salon resté nu, j’ai commencé par réaliser une série de fresque, recomposant des emblèmes décoratives de la Ville et des images de la cité, régulièrement prises de mon téléphone. Puis il y a eu la série des « deux couleurs qui se touchent, presque.» une démultiplication décorative de la dent du chat, sur laquelle ont vue tous les appartements de la cité. J’ai peuplé mes dessins avec des oiseaux, insaisissables présences, bestiaires d’imagiers et de zoo disparu, locataires de nos espaces domestiques comme de nos espaces désaffectés. Tous les jours en hivers, fin de matinée, les mouettes viennent réclamer au pied de l’immeuble. Un quart de quartier, une portion, elles emportent.
Avec les premières peintures et suivant la stratégie des oiseaux, est apparu l’intérêt d’imaginer une production-mémoire, une oeuvre à restituer aux habitants, objet de collection et portion de quartier à emporter.
En photographiant les murs peints du salon, j’ai réalisé une série de foulards, dans l’idée de pouvoir les vendre et de faire transiter au dehors, sur soi, les peintures de Marlioz. Il y a aussi des textes, dont un petit livre « Chez Monique » relatant ma rencontre avec la voisine du dessous, à la suite d’un dégâts des eaux survenu en pleine nuit dans mon appartement.
Monique a été pour moi une présence amicale, parmi les premières. Ce livre lui est dédié, ainsi qu’à mon voisinage, lointain ou proche, ceux que j’ai croisé à Marlioz avec une discrétion respectueuse et qui croiseront peut-être mon travail.

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